Citoyenneté et numérique

Je suis allé jeudi 24 novembre 2011 à l’université Paris-Dauphine assister à des débats autour des thèmes de citoyenneté et numérique.

Sur un des murs de l’amphithéâtre, gravée sur une plaque de marbre, cette phrase de Raymond Aron, tout à fait dans le sujet :

« La liberté politique contribue à rendre les hommes dignes d’elle, à en faire des citoyens ni conformistes ni rebelles, critiques et responsables. »

Organisé par l’EBG et le Conseil National du Numérique, ces débats avaient pour but d’aborder plusieurs thèmes autour de la citoyenneté et du numérique, pris dans son sens large, c’est à dire à la fois Internet, le très haut débit, mais aussi l’Open Data, les aspects économiques et démocratiques.

Débattaient de ces thème des femmes et hommes politiques de différents bords ainsi que des représentants d’association.

Comme d’habitude dans ce genre d’exercice, les temps très courts laissés aux débats ne laissaient que peu de place à l’interactivité avec les citoyens. On se retrouvait donc dans une configuration bien connue : ceux qui parlent d’un côté, ceux qui écoutent de l’autre.

Vous trouverez un compte-rendu que j’ai fait de ces débats en format de livre numérique epub ou en format openoffice odt (tous les deux dans un format ouvert, hein, vous notez !)

De niveau assez inégal, le débat le plus intéressant de mon point de vue a été celui concernant l’Open Data et la e-démocratie, l’identité numérique ayant été passée sous silence.

J’ai pu passer quelques messages :

  • à Laure de La Raudière (députée de la 3ème circonscription d’Eure-et-Loir, secrétaire nationale de l’UMP en charge du Numérique) : utilisez les outils Internet pour faire participer les citoyens désireux de le faire. Vous trouverez de vraies compétences sur de nombreux domaines. Ces citoyens peuvent vous remonter des problèmes à prendre en compte, d’autres donner des pistes de solution. Et puis, le plus important, associez-les aux décisions.
  • à Sandrine Bélier (Députée européenne, Europe Ecologie) : Je suis beaucoup plus en phase avec sa défense de la participation des citoyens aux décisions, avec ce que ça implique de partage de connaissance. Je lui ai juste fait part d’une information sur ce site gouvernemental anglais qui récolte des sujets de préoccupation des citoyens, et qui doit une réponse sitôt que plus de 500 autres citoyens ont voté pour (http://epetitions.direct.gov.uk/). Cela évite les remontées d’un individu seul vers un autre individu seul, du bas (représenté) vers le haut (représentant), sans aucune connaissance de ce qu’a fait le voisin, donc dans une totale dépendance par rapport à celui qui reçoit l’information et sans débat autonome.

J’ai découvert aussi l’association regards citoyens qui fait un travail de collecte d’informations diverses et variées sur l’activité de l’Assemblée et du Sénat, des députés et des sénateurs, des interventions, des questions, des lobbies, etc.

Enfin, je vous les ai déjà conseillés, deux livres dont la lecture est importante pour ces sujets :

  • « Principes du gouvernement représentatif » de Bernard Manin
  • « Egocratie et Démocratie » d’Alban Martin

Voici un résumé de chacun des débats, je vous laisse voir le compte-rendu plus détaillé téléchargeable par un lien ci-dessus.

Fracture numérique : Intégration du numérique dans l’éducation & aménagement du territoire

La discussion a porté essentiellement sur le déploiement du réseau très haut débit (fibre) en France et ses disparités. Pour les opérateurs, on doit laisser du temps au déploiement, horizon à 10-20 ans. Les élus, eux, trépignent, car c’est bien trop long vis-à-vis des besoins qu’ils ont d’avoir un internet ne serait-ce que 2Mo partout. Ils voudraient pouvoir, au titre de leur responsabilité territoriale, intervenir en tant qu’opérateur d’opérateur.
Confrontation entre :
– une logique de rentabilisation maximum de l’existant avant de déployer autre chose (frein au déploiement), de recherche de moyens financiers ou d’engagements supplémentaires (concessions),
– le besoin d’un débit minimum de plus en plus criant et souvent non servi, ressenti par les particuliers et les entreprises, ayant un impact sur l’emploi et l’attractivité des territoires.
Besoin de rééquilibrage des pouvoirs.

Le numérique pour réduire le déficit public et pour accompagner la croissance

Le numérique n’est pas que l’infrastructure, c’est aussi tous les usages du numérique, par les particuliers ou par les entreprises, qui représentent un vrai gisement de croissance et d’emploi.

La réduction des déficits est beaucoup plus mal cernée, allant de la réduction des coûts de licences logicielles à la réduction des coûts de fonctionnement (y compris en personnel), jusqu’à la e-médecine, qui revient souvent comme si tout le monde était en panne d’idée.
Des contradictions qui peuvent n’être qu’apparentes si l’on considère que les emplois créés d’un côté compensent les emplois perdus de l’autre… même si ce ne sont pas les mêmes types d’emplois.

Les parlementaires et politiques présents paraissent n’avoir qu’une idée assez imprécise du numérique, se focalisant sur certains points et accumulant les déclarations vagues et les YAKAFOKON. Pas d’appropriation de la culture Internet, sans même aller jusqu’à GEEK. Ils se présentent pourtant comme ceux qui comprennent le mieux le numérique dans le monde parlementaire…

eDémocratie, Open Data, Identité Numérique & Données personnelles

On voit que l’Open Data permet aux citoyens de se tenir informés de la marche de l’administration et du gouvernement, de leur gestion, des décisions. Elle permet d’accéder à des données très diverses (mesure de l’air par exemple), ouvrant de vastes perspectives sur la création de services qui peuvent les utiliser, les croiser, etc.

L’usage dira si cette volonté sera à la hauteur des attentes, si toutes les données y seront, comment se comporteront les collectivités locales.

EELV a un coup d’avance en tirant les implications en terme de décision directe des citoyens une fois qu’ils seront informés via l’Open Data. Cela sera à mon avis une étape suivante naturelle.

Certainement le débat le plus intéressant de mon point de vue. L’identité numérique n’a pas été abordée. La masse d’information et son aspect certainement assez rébarbatif, spécialisé et complexe risque de poser problème au citoyen lambda. L’utilisation, l’épluchage et l’analyse des données dans un but d’information sur le fonctionnement des institutions risque donc d’être réservé à des personnes ayant le temps et les compétences pour le faire, ce qui reste quand même mieux que rien. Qui sera notre Chomsky ?

Pour ce qui est de l’utilisation de données plus factuelles, gageons qu’à l’instar des autres pays ayant mis en place l’Open Data, de nombreux services verront le jour à l’initiative de citoyens ou d’entreprises privées.

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